Une proposition de loi pour simplifier les règles de l'urbanisme

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Avatar de l'auteur "Hervé KOFFEL" Hervé Koffel

le 10 avril 2025

[ mis à jour le 10 avril 2025 ]

SOMMAIRE

Face à la crise du logement, à l’urgence de la transition écologique et aux lourdeurs administratives qui freinent les initiatives locales, le gouvernement et plusieurs parlementaires veulent insuffler un nouvel élan à l’aménagement urbain. C’est dans cet esprit que le député Harold Huwart a déposé, le 1er avril 2025, une proposition de loi ambitieuse, soutenue par la ministre du Logement, Valérie Létard. Présentée comme un outil de simplification et de rationalisation, cette initiative entend répondre aux attentes exprimées de longue date par les élus locaux et les professionnels de l’urbanisme.

Lors de sa présentation au MIPIM à Cannes, la ministre a rappelé sa volonté d’en finir avec les lourdeurs procédurales et libérer l’innovation, ajoutant que, si le levier fiscal avait été activé dans la loi de finances 2025, il fallait désormais mobiliser le levier réglementaire. La proposition de loi (PPL) suit donc une logique de modernisation du droit de l’urbanisme, avec pour priorité de faciliter la construction de logements neufs, la réhabilitation et la transformation des espaces bâtis.

Densification des zones urbaines, adaptation des règles locales d’urbanisme, généralisation de certains outils d’aménagement, raccourcissement des délais de contentieux : une réforme réfléchie pour offrir aux collectivités un cadre juridique plus souple, plus rapide et plus opérationnel. Tout cela en gardant un cap clair, qui est de concilier performance administrative, réponse à la demande de logements, et respect des objectifs environnementaux.

Un urbanisme plus souple et réactif

Le premier levier de la proposition de loi portée par le député Harold Huwart (LIOT, Eure-et-Loir) réside dans la volonté de desserrer les contraintes réglementaires qui pèsent sur les documents d’urbanisme, en particulier les plans locaux d'urbanisme (PLU). Ces documents, souvent perçus comme rigides et peu adaptés à l’évolution rapide des territoires, limitent dans bien des cas la capacité des élus à répondre efficacement aux besoins de logement ou de revitalisation de certaines zones.

L’un des changements proposés consiste à élever le seuil de majoration de surface de construction autorisée sans procédure de modification du PLU, en le passant de 20 % à 50 %. Concrètement, cela signifie qu’un projet de construction pourra voir sa surface augmenter jusqu’à la moitié de ce qui est prévu initialement, sans enclencher une procédure longue et complexe de modification du document d’urbanisme. Ce mécanisme tend vers l’objectif affiché de « refaire la ville sur la ville » et de densifier l’existant plutôt que de consommer de nouveaux espaces.

Dans le même esprit, la PPL prévoit l’élargissement des dérogations aux règles du PLU. Actuellement limitées aux zones où s’applique la taxe sur les logements vacants, ces dérogations seraient étendues à toutes les communes dites "tendues", c’est-à-dire où la demande de logements excède l’offre. Cette adaptation réglementaire permettrait aux maires de mieux ajuster les projets à la réalité de leur territoire, sans être freinés par des zonages rigides.

proposition de loi simplification urbanisme – Plan Local d'Urbanisme
© Matchou - Shutterstock

Autre innovation notable : la souplesse accrue accordée à la reconversion des friches et des entrées de ville. Nombre de PLU ont été rédigés avec des vocations monofonctionnelles (zones uniquement commerciales, industrielles, etc.), ce qui freine leur transformation en quartiers mixtes incluant du logement. La proposition de loi entend faciliter ces reconversions en levant les verrous juridiques existants, une mesure d’autant plus stratégique que ces secteurs représentent souvent un potentiel foncier important en cœur ou en périphérie urbaine.

Le texte cherche à répondre à plusieurs objectifs et trouver un équilibre urbain en accélérant la production de logements et en limitant en même temps l’artificialisation des sols, dans un contexte où la sobriété foncière devient une norme législative.

”Selon un récent rapport du Sénat par exemple, 50 % des collectivités territoriales interrogées [font de l’urbanisme] un secteur prioritaire de simplification.

Les procédures d’élaboration et d’évolution des documents d’urbanisme, d’instruction et de délivrance des demandes d’autorisations d’urbanisme se sont multipliées et alourdies au cours des dernières décennies, entraînant un accroissement du risque juridique et de nouveaux coûts difficilement compréhensibles alors que le pays traverse une crise aigüe du logement.”

Proposition de loi de simplification du droit de l’urbanisme et du logement n°1240
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Moins de blocages, plus d’efficacité

La proposition de loi s’attaque aux lenteurs administratives et aux obstacles contentieux qui retardent, voire paralysent, de nombreux projets de construction ou de réhabilitation. Ici, une autre nécessité se dessine : rendre les procédures plus fluides, les délais plus courts, et les outils plus adaptés à la complexité des projets urbains contemporains.

La généralisation du permis d’aménager multisites

Ce dispositif, jusqu’ici réservé aux Projets Partenariaux d’Aménagement (PPA) et aux Opérations de Revitalisation du Territoire (ORT), permet à une même autorisation d’urbanisme de couvrir plusieurs parcelles non contiguës, à condition qu’elles s’inscrivent dans une même logique d’aménagement.

Son extension à d'autres opérations, sous conditions, dégage un gain de temps et de coordination considérable pour les collectivités comme pour les promoteurs. Elle répond aussi à la réalité des tissus urbains morcelés, notamment dans les centres-villes ou les zones en reconversion.

Réforme du contentieux en urbanisme

Ce domaine est souvent chronophage et source d’insécurité juridique. Deux mesures sont proposées pour améliorer les processus :

Des ajustements qui ont vocation à accélérer la mise en œuvre des projets, tout en conservant un droit au recours, mais sans que celui-ci puisse bloquer durablement l’action publique ou privée. C’est une tentative d’équilibre entre protection des droits et efficacité administrative.

proposition de loi simplification urbanisme – Concept de litige
© Andrii Yalanskyi – Shutterstock

Renforcement des sanctions contre les constructions illégales

Le montant de l’astreinte journalière que peut prononcer un maire ou un président d’EPCI en cas d’infraction passerait de 500 à 1 000 euros par jour, avec un plafond rehaussé à 100 000 euros (contre 25 000 actuellement). Il s’agit de redonner aux collectivités les moyens de faire respecter leur stratégie d’aménagement, en évitant que du foncier stratégique ne soit accaparé par des usages non conformes.

Ce volet de la réforme illustre un changement de paradigme : faire de l’urbanisme non plus un simple cadre de contraintes, mais un outil opérationnel, réactif, et adapté aux réalités locales, en réduisant les délais d’exécution sans pour autant lésiner sur la sécurité juridique des projets.

Adapter l’urbanisme aux réalités locales et environnementales

Bien entendu, simplifier l’urbanisme ne signifie pas sacrifier l’ambition écologique. La proposition de loi cherche également un équilibre entre exigences environnementales et contraintes budgétaires.

La question de l’énergie solaire

L’article 1 du texte prévoit un assouplissement des obligations de solarisation et de végétalisation qui pèsent actuellement sur les bâtiments publics. Ces obligations, issues de la loi du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, imposent des installations photovoltaïques ou des toitures végétalisées dès que la surface d’un bâtiment dépasse 500 m². La proposition de loi propose de relever ce seuil à 1 100 m², avec une entrée en vigueur en janvier 2028.

Selon Harold Huwart, cette mesure permettra de lisser les investissements nécessaires pour les collectivités, souvent confrontées à des budgets contraints, en respectant tout de même le droit européen. Le député précise qu’il ne s’agit donc pas d’un recul écologique, mais d’un “réajustement pragmatique” pour éviter que des obligations techniques ne deviennent des freins à l’action publique locale.

Les SPLA-IN et EPFL

En outre, le texte propose de renforcer les outils d’aménagement à disposition des territoires, notamment en étendant les missions des Sociétés Publiques Locales d’Aménagement d’Intérêt National (SPLA-IN). Actuellement habilitées à réaliser des équipements d’intérêt collectif, elles ne peuvent pas en assurer l’entretien ou la maintenance, même de manière transitoire. La loi leur ouvrirait cette possibilité, offrant ainsi une plus grande souplesse dans la gestion des projets complexes ou en phase d’amorçage.

En parallèle, la simplification des conditions d’adhésion des communes aux Établissements Publics Fonciers Locaux (EPFL) est mise en avant dans la PPL. Dès 2028, une commune compétente en matière d’urbanisme pourra rejoindre un EPFL même si son intercommunalité n’a pas encore pris position. C'est ici un moyen d’élargir la couverture territoriale de ces établissements essentiels dans la reconversion foncière et la mobilisation du foncier en zone urbaine.

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© ronstik - Shutterstock

Le changement d’usage des bâtiments

Enfin, la PPL propose une mesure stratégique sur le plan du logement : permettre la tranformation de bureaux en logements, y compris dans des zones où le PLU interdit explicitement la destination « habitation ». Cette dérogation, dans la lignée de la loi Daubié, s’appliquerait notamment aux communes soumises à une forte tension immobilière.

En 2025, on estime que 9 millions de m² de bureaux sont vacants en France, dont 5,2 millions en Île-de-France, soit près de 15 % du parc tertiaire régional. Adapter ces espaces inutilisés à la demande de logements est une priorité d’efficacité et de sobriété foncière.

Le dernier volet de cette PPL cherche à donner aux territoires les leviers nécessaires pour s’adapter, que ce soit aux contraintes environnementales, à la vacance immobilière ou à la nécessité de construire autrement. Le texte adopte une position novatrice : L’urbanisme doit devenir un outil stratégique de la transition écologique et sociale, plus qu’un simple cadre normatif.

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